Je participe au raid moto de la Gibraltar race 2023 ! J8 & 9

Bon an, mal an, me voici sur la ligne de départ de la 8ème journée de la Gibraltar Race. Les paysages fantastiques sont au rendez-vous. Mais aujourd'hui encore, mon manque de technique se fait ressentir. Comment combiner ménagement physique et plaisir de rouler sans accumuler trop de frustration ? Le compromis est compliqué à trouver mais j'affine la recette au jour le jour.

Au programme : grosse, grosse journée avec 470 km à abattre dont notamment deux spéciales de 56 et 66 km ! Je pars plutôt confiant. Mon moral est au plus haut et je sais quelles limites me fixer.

Aujourd'hui, la plupart des spéciales se déroulent en montagne. Sierra Casola, Sierra Nevada, les pistes sont magnifique et les paysages sublimes. Toutefois, il faut rester vigilant car sur ces points culminant espagnols, chaque erreur de pilotage peut coûter cher. Tu veux un exemple ? Tyler, un super bon motard, a fait une sortie de piste avec sa 790. Coincé sous sa moto dont le réservoir d'essence fuyait, il s'est fait une belle frayeur ! Demain, il ne roulera pas.

1ère spéciale : super, tout se passe bien. 2ème spéciale ? Je serre les fesses, je croise les doigts et je récite quelques incantations druidiques lors d'une descente jonchée de galets. Ça passe ! Mais, j'ai bien cru que j'allais me foutre au tas. Ouf...

Ma seule critique du programme d'aujourd'hui : à 20km de Malaga, nous devons affronter une ultime piste de montagne bien casse-tronche car pavée de galets. Selon moi, ce n'est pas nécessaire, voire dangereux en cette fin de cette grosse journée. J'en fais part à l'organisation. De mon côté, je joue la prudence. Évidemment, mon rythme tranquille me vaut des pénalités mais je ne veux pas prendre de risque et surtout prendre du plaisir !

Mes compagnons de route aujourd'hui ? Euh.. personne. Je roule seul. Il faut dire que le bagage technique des autres concurrents est nettement meilleur que le mien en off-road. D'ailleurs, sur route aussi. Ils roulent vite. Trop vite à mon goût. Là, tu vas me dire : "c'est une course, non ?". Oui, tu as raison, sauf qu'elle se déroule sur route ouverte dont le goudron fond au soleil... Je me rappelle parfaitement ma belle glissade sur 30m dans les mêmes conditions, il y a 3 semaines dans le Cantal... L'objectif est aussi de profiter des sublimes décors, non ? Je décide donc de sacrifier le chrono sur l'autel de la contemplation paysagère. D'ailleurs, je ne croise pas grand monde aujourd'hui. Mis à part un serpent qui traverse devant ma roue, le zones traversées sont désertiques. Quel pied de rouler dans ces régions isolées ! Et puis, quel plaisir aussi de quitter le cagnard pour trouver un peu de fraîcheur dans les sous-bois de la Sierra Nevada.

Aujourd'hui, je finis la journée très content de moi.

Pourquoi ? J'ai rempli les objectifs queje m'étais fixé. À savoir, passer tous les waypoints et ne pas tomber. 3ème jour consécutif sans chute !

Vraiment, je m'accroche à cette idée car je sais qu'il m'est presque impossible de relever la T700 seul. Du coup, chaque gamelle me met au fond du trou psychologiquement. Fait exceptionnel ? Je suis 19ème sur 25 ! Pas que je roule pour le classement, mais cela m'apporte une satisfaction non-négligeable. Mon moral est au top ! Pour info jusqu'à maintenant, 10 motards sur 35 ont abandonné la Gibraltar race.

Fait de course notoire aujourd'hui ?

Mickaël, de la team Axuri Trail, explose son moteur. Après 30 ans de bons et loyaux services, sa 600XT rend l'âme. L'huile pisse de partout. C'est d'autant plus frustrant que cet ancien pilote de rallye routier était dans le top 10 de la Gibraltar Race. Tu l'auras compris, les machines aussi sont mises à rude épreuve durant cette course.

Aujourd'hui, tout ne se passe pas comme prévu... Pourtant, ça démarre pas trop mal. Je sers même de guide pour un super bon pilote ! Aurais-je vachement progressé ? Non, il avait juste perdu la trace de la liaison... Arrivés à la 1ère spéciale, il a retrouvé sa carte (et le sourire). Faut dire que suivre mon rythme d'escargot devait être frustrant pour lui.

De mon côté, je finis cette épreuve proprement en ralliant tous les points de passage. Nickel. Sauf que ? C'est une autre histoire sur la seconde spéciale. Certains waypoints sont cachés et clairement, mon tracé laisse à désirer. Alors inévitablement, je me paume. Je perds beaucoup de temps. Épuisé, je chute en explosant mon protège-main. Mais tant bien que mal, j'arrive à relever la bécane et à repartir. Je suis rincé... Ayant perdu toute lucidité, les mauvaises décisions s’enchaînent et je m'engage bêtement dans un lit de rivière où aucun autre concurrent n'a dû passer. Ce qui devait arriver arrive et je me tombe à nouveau. Cette fois, impossible de remettre sur ses roues mon enclume estampillée Yamaha. Les danois passent par là. "Euh, les gars, vous pouvez m'aider stp ?". Ils acceptent. Toutefois, ils finissent d'abord leur spéciale. 40 minutes plus tard, ils sont de retour et me sortent du pétrin. 40 minutes à galérer, à m'épuiser et à perdre beaucoup d'énergie.

Je file alors sur le désert de Gorafe. Sublime ! Un vrai cagnard, mais splendide ! Et plus je m'enfonce dans cet étendue dénuée de vie, plus les paysages se magnifient. Accessoirement, l'exigence technique de ces pistes se renforce. Fait étonnant ? Nous passons une section boueuse. Oui, oui, de la boue en plein désert. Je ne manque pas cette occasion pour me viander à nouveau ! Les Danois à la rescousse. Merci mille fois ! Nous ne sommes pas trop de trois pour relever la T700.

À la fin de cette section, je suis au bout de ma vie. Rincé. Vidé. Enfin, tu vois l'idée. Je décide alors d'écourter les hostilités et de rallier le bivouac par l'asphalte. S'en suivent 220km d'autoroute ignobles. Mais toujours est-il que shunter les dernières spéciales me permet de m'économiser un peu en espérant pouvoir repartir presque en forme demain.

Arrivé à destination, je prends le temps de bricoler ma bécane. Tyler, qui a fini coincé sous sa moto hier, me donne gentiment un pare-main pour remplacer celui que j'ai explosé aujourd'hui. À 20h, Vincent de la team Axuri Trail nous rejoint enfin. Mirko, pourtant habitué de la course, a réussi à se perdre lors de la dernière spéciale. Les derniers finishers de cette journée dantesque étant Les Danois débarquant à 23h. Tu te rends compte ? Ils auront passé presque 15 heures à moto !! Cela me conforte encore davantage dans mon choix.

Le programme de demain : 576 km dont 320km de tout-terrain. Un truc de psychopathe ! Surtout pour mon niveau technique et mon état d'épuisement après 8 jours d'épreuve. Ma stratégie me permettra-t-elle d'aller jusqu'au bout ? Vais-je réussir à m'économiser sans trop me frustrer ? Je vous raconte la suite dans quelques jours !

----> Je relève le challenge de la Gibraltar race : 5ème jour & 6ème jour, deux belles journées ; 7ème jour : repos (épisode 4)